28/05/2016

Domiciliation d'une entreprise dans un local d'habitation


La domiciliation d'une société dans des locaux à usage d'habitation loués avec un bail comportant une clause "d'habitation bourgeoise" est-elle possible ?
Selon un arrêt de la Cour de cassation du 25 février 2016, il n'est pas interdit de domicilier une société commerciale dans son logement même si une clause du bail interdit toute activité professionnelle à partir du moment où il n'y a aucun trouble pour le voisinage qui résulterait de l'accueil d'une clientèle, de la présence d'une activité commerciale, d'un secrétariat, ou de machines.

Les clauses d'habitation bourgeoise, prévues par la loi du 10 juillet 1965 sur la copropriété des immeubles bâtis, peuvent être simples ou exclusives. Dans le premier cas, les locaux peuvent avoir une autre destination que l'habitation, et permettre des activités professionnelles avec certaines restrictions. Dans le deuxième cas, les locaux sont exclusivement à usage d'habitation et aucune activité professionnelle ne peut en principe y être exercée.

Cette récente décision de justice confirme que la domiciliation d'une personne morale ne change pas la destination des locaux si aucune activité n'y est exercée et si aucun trouble de voisinage n'a été constaté. Une telle domiciliation est donc possible sachant que "la preuve d'une violation de la clause d'habitation bourgeoise" devra dans tous les cas être apportée par le propriétaire des lieux.
Cour de cassation, civile, 25 février 2016, 15-13.856

La règlementation existante distinguait déjà clairement la domiciliation d'une entreprise qui ne modifie pas la destination du local, de l'exercice d'une activité professionnelle au domicile du dirigeant ou de l'entrepreneur qui nécessite elle un changement d'usage, au moins partiel, du local.

L'exercice d'une activité professionnelle - et non la seule domiciliation - dans des locaux à usage d'habitation par les entrepreneurs ou les dirigeants de société reste soumise à des conditions (malgré des assouplissements récents : loi Dutreil de 2003, loi du 4 août 2008, loi du 1er janvier 2009).

La règlementation applicable en matière d'affectation d'un local à usage d'habitation, ou d'une partie de ce local, à une activité commerciale, se résume comme suit - sous réserve d'évolutions possibles de la loi, des pratiques, et de l'existence de nombreux cas spécifiques.

1/ Dans les villes de plus de 200 000 habitants et dans les départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, les conditions pour installer une activité commerciale dans un local à usage d'habitation sont :
- absence de clause contraire dans le bail ou le règlement de copropriété
- activité exercée uniquement par les occupants du local (résidence principale)
- absence de réception de clientèle ou de marchandise
En cas de réception de clientèle ou de marchandise, ou si les locaux sont situés au rez-de-chaussée, l'activité ne doit pas occasionner de nuisance ou de danger pour le voisinage ainsi que pour le bâti de l'immeuble.
Toujours en cas de réception de clientèle ou de marchandise, une autorisation préalable du maire de la commune est nécessaire.
Si d'autres personnes que les occupants du local d'habitation exercent l'activité ou y participent, une autorisation préalable du maire de la commune est nécessaire.

2/ Dans les villes de moins de 200 000 habitants ou dans les zones franches urbaines (ZFU), un entrepreneur individuel peut exercer son activité à son domicile, et une société peut avoir son siège social au domicile de son représentant légal et y exercer son activité sans autorisation préalable du maire. Il faut cependant vérifier que le bail ou le règlement de la copropriété ne l'interdisent pas, et il est conseillé de prévenir le bailleur ou le syndic de copropriété avant d'installer son activité. Il faut aussi vérifier éventuellement les règles d'urbanisme applicables. Le maire d'une commune de moins de 200 000 habitants peut demander la règlementation des changements d'usage : à vérifier également avant de s'installer. Il y a par ailleurs des restrictions spécifiques pour les locaux situés au rez-de-chaussée d'HLM.

3/ Le changement d'usage d'un local d'habitation en local commercial ou partiellement commercial (usage mixte) peut donc nécessiter une demande d'autorisation à la mairie (communes de plus de 200 000 habitants...).
Si un logement est désigné par le règlement de copropriété comme exclusivement à usage d'habitation, le changement d'usage n'est possible que si ce règlement est modifié à l'unanimité des copropriétaires.
Pour les locataires ayant un bail d'habitation, il faut l'accord du propriétaire ou bailleur avant d'effectuer le changement de destination, et la modification du bail est obligatoire. Dans le cas d'un bail mixte, les activités non commerciales (professions libérales) sont possibles sans autorisation, même s'il vaut toujours mieux prévenir le bailleur.

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