17/11/2019

A quelles conditions un dirigeant peut-il être salarié de sa propre société ? et comment choisir la forme de sa société ?


Il faut distinguer deux choses : le contrat de travail du dirigeant qui n'est possible que sous certaines conditions et son statut social qui dépend de la forme de sa société

1/ Contrat de travail

Un dirigeant de société peut avoir un contrat de travail à condition que trois conditions soient remplies:

- Il doit exercer une fonction nécessitant des compétences techniques bien définies, et différente de son mandat de direction. C'est plus facile à démontrer dans les sociétés d'une certaine taille que dans des petites sociétés où le travail du dirigeant est moins délimité, mais ce n'est pas impossible.
- Le dirigeant doit avoir une rémunération clairement associée à sa seule fonction de salarié et éventuellement une autre rémunération pour son mandat de dirigeant.
- Il doit y avoir un lien de subordination entre la société et son dirigeant. Ce lien résulte du contrôle effectif du dirigeant par la société qui l'emploie. Certains éléments peuvent confirmer ou non ce contrôle, comme le pouvoir de donner des ordres et de contrôler leur exécution, la fixation de la rémunération, de l'horaire de travail etc.

La troisième condition est celle qui peut entraîner d'emblée l'impossibilité de conclure un contrat de travail dans le cas de dirigeants majoritaires.

Le dirigeant associé unique d'une EURL ou d'une SASU n'est pas dépendant d'une autorité tierce, il n'a pas de comptes à rendre, et donc la possibilité d'un contrat de travail est exclue.


Il en va de même pour le dirigeant associé majoritaire de SARL ou actionnaire majoritaire de SAS.

Le dirigeant associé minoritaire/égalitaire de SARL ou actionnaire minoritaire de SAS peut en principe avoir un contrat de travail. Cependant chaque cas est à étudier pour déterminer s'il y a ou non un lien de subordination.

2/ Statut social des dirigeants et organisme d'affiliation selon le type de société

Selon la forme de leur société et leur part dans le capital, les dirigeants rémunérés sont ou bien des travailleurs indépendants, affiliés à la sécurité sociale des indépendants(ex RSI), ou bien ils sont dit "assimilés-salariés" et sont alors affiliés au régime général de la Sécurité sociale.
C'est la forme de leur société qui détermine leur statut. S'ils sont assimilés-salariés, les dirigeants peuvent avoir un contrat de travail mais en remplissant aussi les trois conditions déjà évoquées.

Société Sécurité sociale des indépendants Régime général de la Sécurité sociale
SARL (1) Gérant majoritaire Gérant minoritaire ou égalitaire
EURL Gérant majoritaire
SAS Président
SASU Président
Société civile, SCI Gérant associé Gérant non associé (lien de subordination)
SA Président, Directeur général
SELARL Gérant majoritaire Gérant minoritaire ou égalitaire

(1) Pour les SARL, lorsqu'il y a cogérance, c'est le nombre de parts détenues par l'ensemble des gérants, qui détermine leur caractère minoritaire ou égalitaire.
Les parts détenues par le conjoint et les enfants mineurs sont prises en compte dans le calcul de la détention du capital par le gérant.

3/ Avantages et inconvénients des différentes possibilités

- Comparaison des salariés avec les dirigeants assimilés-salariés

Les dirigeants assimilés-salariés ont la même protection sociale que les salariés, à l'exception de la couverture du chômage (une indemnisation est prévue depuis le 01/11/2019, mais à un taux modeste).
Pour bénéficier de la législation du travail (indemnités de rupture, licenciement...), ils doivent en outre avoir un contrat de travail, ce qui n'est pas toujours possible comme il a été dit ci-avant.
D'autres particularités par rapport aux salariés stricto sensu sont à relever : pas de réduction générale des cotisations pour les salaires n'excédant pas 1,6 fois le SMIC (inconvénient pour l'entreprise), absence d'indemnité compensatrice de congés payés, rémunération non comprise dans l'assiette du CICE, pas d'évaluation forfaitaire des avantages en nature pour la nourriture et le logement.

- Régime des assimilés-salariés comparé au régime des travailleurs non salariés (TNS)

La protection sociale des assimilé-salariés est meilleure que celle des indépendants, pour la maladie, la retraite ou les accidents du travail. C'est une raison importante dans le choix d'une SAS/SASU par rapport à une SARL/EURL.
Le régime des TNS étant moins favorable en particulier en matière de retraite et de prévoyance, il est possible de le compléter avec des contrats madelin par exemple. L'assurance chômage est identique dans les deux systèmes : absente ou modique, avec possibilité de souscription d'une assurance complémentaire.
Mais le coût de cette protection sociale meilleure est à considérer avec attention. En effet, le taux de charges sociales est de 47% environ pour les travailleurs indépendants contre de 70% du brut pour les assimilés-salariés. Si l'on veut comparer des choses comparables, l'écart est encore plus important. Les 47% s'appliquent au montant perçu par les TNS. Et si on prend le total charges patronales + charges salariales par rapport au net perçu par les assimilés-salariés, on arrive à un taux de 80 à 85 %. De plus, avec l'augmentation de la rémunération, le taux des charges des TNS diminue et l'écart avec le régime des assimilés-salariés augmente.
On peut dire approximativement que le coût des charges sociales est deux fois plus important pour un cotisant au régime général que pour un indépendant.

Pour avoir une idée plus complète des conséquences financières du choix du statut social, il faut aussi prendre en compte les charges sur les dividendes éventuels.
Les dividendes versés aux dirigeants assimilés-salariés - au président d'une SAS/SASU, ainsi qu'au gérant minoritaire/égalitaire d'une SARL - sont soumis aux prélèvements sociaux de 17,2 % (17,2% + 12,8% d'impôt = 30 % de retenue à la source ou flat tax). Alors que les dividendes versés à un gérant majoritaire d'une SARL, ou à un gérant d'une EURL, sont soumis aux cotisations sociales totales au taux de 47%, sauf pour la part des dividendes inférieure à 10% du capital qui est soumise à 17,2% de prélèvements sociaux.

Au final, il est préférable d'être conseillé par un professionnel lors de la création d'une société, pour envisager les différentes solutions possibles avec leurs conséquences en matière de protection sociale et de coût.

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